Les Journées européennes du Patrimoine 13 et 14 septembre 2008
Age du Bronze, 1358 avant J.-C
Heureusement, l’hiver n’a pas été trop rude. Mais malgré tout, il n’a pas épargné ma soeur cadette. Hier soir nous l’avons enterrée au confins de l’île, là où le soleil se couche.Tout le village était là.
J’ ai mis à son cou une parure que je lui avais confectionnée. Ma mère a fixé ses habits avec cette fibule qu’elle adore et qui était la première que j’avais réussie. Temps de tristesse...Temps de joie aussi.
Car non loin de là vit une délicieuse jeune fille. Elle occupe toutes mes pensées. Il y a quelques jours, j’ai pu obtenir du bronze et je créé un bracelet que j’ai finement gravé. Je suis sûr qu’il lui plaira....Pour son fin poignet.
Dans quelques instants, je vais la voir. Je marche vers elle, le bijou au creux de ma main. Elle m’attend sur le promontoire, en face de la montagne où le soleil se lève. Pourquoi ce lieu est-il si particulier ?
An 1233 après J.-C., St Jean d’été
Saint-Triphon approche enfin. Il faut que je sois sur place avant le lever du soleil. Que Dieu me donne la force, car la montée est rude .
Tiens, les premiers marchands arrivent déjà ! On nous arrête au portique d’entrée, on contrôle nos identités. Heureusement ce ne sera pas trop long, car j’ai
avec moi la lettre de l’abbé Hugo de Saint-Maurice qu’il m’a personnellement remise hier lorsque je quittais notre cloître. Il a ordonné la construction de la chapelle l’an passé. Je ne l’ai encore jamais vue.
Le maître d’oeuvre de la confrérie des bâtisseurs doit déjà m’attendre. Un apprenti vient me chercher :
- Noble moine, venez vite ! Le soleil va se lever dans quelques minutes !
Le chemin qui me mène à la chapelle s’éclaire peu à peu. Combien de gens ont déjà foulé cette terre ? Est-il possible que d’autres hommes et femmes, bien avant la naissance de notre Christ aient déjà admiré ce halo de lumière derrière la montagne ?
Le soleil apparaît au moment où je vois le maître bâtisseur. Son visage s’illumine d’un sourire .Oui, tout est parfait, tout est harmonie et équilibre, comme cette végétation si particulière que je peux admirer ici, comme la chapelle qui a été conçue dans les règles de l’art et qui pourra d’ailleurs bientôt être consacrée. Je redescends vers le bourg et le champ de foire. Au passage , j’admire la tour fortifiée du château. Bel ouvrage.
Le maître bâtisseur m’assure qu’il a engagé ses meilleurs tailleurs de pierre. Avec une telle construction, les villageois sont bien protégés.
Quelle foule de marchands déjà sur le pré. La fête sera belle.
Je quitte St–Triphon, heureux de ce que j’ai vu. Je retourne dans le silence du cloître.
13 et 14 septembre 2008 après J.-C., Journées Européennes du Patrimoine
J’avais pensé aller visiter le site de St–Triphon. A longueur d’année, je contourne ce caillou avant de prendre l’autoroute. Mais aujourd’hui, il pleut et il fait froid. Rester sous la couette est si tentant ...
Mais puisque « pluie du matin n’arrête pas le pèlerin », je me lève et me lance à l’assaut de la colline (en fait, il pleuvra toute la journée du samedi).
Les tentations sont nombreuses de s’écarter de l’ojectif fixé. D’abord, il y a les ballades d’Ollon. On vous invite à partager un verre au chaud . Non, je fonce directement dans les carrières de Fontenailles, ce jour-là mouillées et bien glissantes. La récompense est de taille, le site est splendide, même sous la pluie. Une porte s’ouvre sur l’univers de la géologie. J’ en sors un peu moins ignard.
Deuxième tentation à l’entrée de la colline du Lessus : L ‘AIST y tient un petit stand . Finalement pourquoi résister à ces pâtés, biscuits et boissons. C’est bon et l’argent récolté servira à divers projets de l’association. Deux historiennes et deux biologistes nous attendent.
Quel courage les anime. Pendant 2 jours , bravant le froid, la pluie et le vent, ils ont transmis leur savoir avec un enthousiasme qui n’a jamais faibli.
Je quitte la colline avec dans ma tête des mots comme retrait des glaciers, fracture du supercontinent Pangée, nécropoles du Néolithique, âge du Bronze, collection Pousaz-Gaud, tour carrée du Moyen-Age, chapelle romane, signal bernois, château disparus, ruines à explorer, climat subatlantique, fragon petit- houx, cyclamen de Naples, calcaire, marbre........
.........Et dans le coeur un grand merci. Désormais, le trajet quotidien vers l’autoroute a une autre saveur. Mes pensées vont vers tous ces hommes et femmes qui ont foulé la colline au travers des âges.
An 3295 après J.-C.
Archives de 2710 après J.-C. de l’université de Panlémania, extrait d’épreuve d’examen : « Connaissant le virage qu’a pris l’humanité à l’aube du XXIIème, citez les conséquences de ce choix sur la région Chablais et plus précisement sur la colline de St- Triphon. »
Evelyne Nantermod, St-Triphon |